Le particularisme culturel revendique quelque chose comme un noyau dur et original dans une culture. C’est ce noyau dur qui justifierait le maintien des traditions, ce serait pour ne pas le perdre qu’il faudrait s’opposer à tout changement. Cette idée n’est pas propre aux seuls particularistes. Elle est exprimée par tous ceux qui font, souvent sans le savoir, de la culture une réalité donnée que les changements abîmeraient. Je pense que peu de gens seraient capables de soutenir longtemps cette idée sans la trouver absurde. Pourtant elle semble sous-jacente à beaucoup de discours qui défendent une culture comme s’il s’agissait d’une réalité aux contours bien nets. Il est aujourd’hui fréquent d’entendre des propos nationalistes revendiquer la défense de la culture nationale. De tels propos sous-entendent la conception d’une culture homogène, spécifiquement française, ayant une origine absolue, c’est à dire un début nettement identifiable. Lire la suite »
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Les modes sont comme les vagues de la mer : elles vont et viennent, apparaissent et disparaissent sans cesse, et pourtant, elles sont toujours là. La constance du phénomène explique pourquoi on met le mot au singulier « la mode », comme si c’était toujours la même chose. Vue sous cet angle, la mode est un éternel retour et semble assujettie à une mécanique sociale. En allant dans ce sens, certains la critiquent comme une sorte de conformisme exacerbé. Elle serait une expression tyrannique du mimétisme social. La préposition « à » dans l’expression « être à la mode » pourrait traduire cette aliénation en signifiant que l’on appartient à la mode. Pourtant, il est remarquable qu’une mode naît en contradiction avec la mode précédente, une mode est d’abord minoritaire et s’oppose à une mode majoritaire conformiste. Cela nous incite à reconsidérer « les modes » au pluriel, comme une multitude de phénomènes sociaux synchroniques. En outre, ceux qui considèrent la mode comme un pur conformisme ont peut-être en tête les modes vestimentaires. Mais la mode concerne généralement des manières d’être, de penser et de faire collectives et temporaires. Dans ce sens, il faut réinterpréter la préposition « à » dans l’expression « être à la mode » comme indiquant le moyen ou la manière. Prise dans ce sens, la mode est une habitude collective au même titre que la tradition, sauf qu’elle se démarque par sa courte durée. Cette courte durée peut être interprétée d’au moins deux manières : soit elle montre que la mode n’est qu’une apparence sans profondeur, superficielle, ce qui signifie que la mode est frivole, soit elle est constitutive d’une dimension originale de la vie sociale et son caractère temporaire est peut être le signe qu’elle fuit le conformisme.
Imaginez Adam, le premier jour de sa vie, adulte et sachant parler. Il voit Eve et veut lui dire qu’il est heureux d’être avec elle dans le jardin d’Eden. Mais il est arrêté par un doute : « Dieu m’a donné un langage et il a dû donner le même à Eve, mais comment savoir si Eve comprendra ce que je lui dis ? Je veux lui dire que je suis heureux, mais peut-être qu’elle ne met pas le même sens que moi derrière le mot « heureux ». Peut être que le mot « heureux » désigne chez elle un sentiment très différent de celui auquel je pense. Comment savoir si nous nous comprendrons ? » Ce problème concerne toute communication.