Texte 3 sur 8 de Voyage aux Amériques


M&M'sÀ New York, il existe peu de toilettes publiques, qu’elles soient gratuites ou payantes. Lorsqu’une envie se fait sentir – et elle se fait tôt ou tard sentir compte tenu de l’incommensurable volume de boisson de tout genre ingéré -, les gens vont dans les boutiques et autres restaurants se soulager sans qu’ils ne soient obligés de consommer. Il est toléré que n’importe qui aille tirer la chasse, chose impensable dans d’autres pays comme, par exemple, la France.

Peut-être y a-t-il un article de loi obligeant à laisser l’accès libre, tout comme en France les barmen sont sommés de servir gratuitement un verre d’eau à quiconque en fait la demande ? Pas sûr. Reste que les établissements où il est indiqué à l’entrée « restroom for customers only » sont aussi rares que les toilettes publiques. C’est, paraît-il, la même chose à Londres.

Le service public de la défection n’est ainsi pas assuré par l’État, par une fonction publique, par une armée de fonctionnaires ou d’entreprises privées rémunérées par le contribuable, mais est offert gracieusement par le privé lui-même – et quelques lieux publics comme les musées. Dans le cas du pipiroom, cet agencement fonctionne parfaitement bien. Ni pièce à sacrifier dans ces cabines automatiques que l’on connait bien, ou à remettre à la dame pipi (ce qui gâche, il est vrai, certains emplois millénaires, mais qui peut-être ne sont que transférés ailleurs). Ce modèle d’organisation du service public s’avère ici pour l’usager moins onéreux, et souvent même plus agréable.

Le réseau des WC est en effet beaucoup plus étendu que dans n’importe quel autre pays où les toilettes publiques sont nationalisées. Pensez que dans certains quartiers, il y a un Starbucks tous les 20 mètres, chacun très bien équipé. De plus, ce réseau est souvent beaucoup mieux entretenu. Il en a va de l’image de marque de l’établissement qui les propose, et l’on pourrait proposer la règle suivante :

Montre-moi tes toilettes, je te dirai qui tu es.

À ce titre, celles du M&M’s store de Times Square valent presque à elles seules un déplacement. Est-ce cependant avantageux pour les professionnels ? Les impôts en moins qu’ils ne paient pas pour l’entretien d’un réseau quasi inexistant sont remplacés par une augmentation substantielle du coût de leurs toilettes qui sont plus utilisées. Mais sans doute s’y retrouvent-ils : de belles toilettes peuvent attirer le client. C’est un outil marketing, surtout pour les grandes enseignes.

Il en est ainsi de l’organisation des toilettes publiques comme de l’accès à l’Internet et aux outils technologiques dans les Apple Store. À l’heure où l’on chahute au sujet du service public des TCL, ce modèle est très certainement à méditer. Ainsi, concernant les transports, remarquons que les Velo’V – que l’on peut assurément déclarer service public – furent initialement mis à la disposition des usagers presque gratuitement par un privé, avec pour seule attente un bénéfice marketing.

Cependant, pas de Velo’V à New York. Simplement des vélos et des transports publics dont nous aurons à reparler.

TO BE CONTINUED

[amtap book:isbn=2848141050]