Dialogue sur la peine de mort
– Oui, mais ! Comme le dit Socrate dans le Gorgias, il y a des méchants incurables ; on ne peut rien faire pour eux, ils ne changeront jamais, ce sont des multi-récidivistes, etc ; tuons-les !
– Mais c’est là que l’on va trop vite : vous émettez une théorie conjecturale sur le fait que cette personne ne changera jamais ; en somme c’est la même erreur que celle de Schopenhauer quand il postule une immuabilité des caractères : le caractère incurable de criminelle que vous croyez déceler chez celui que vous jugez ne relève pas du Monde 1 mais du Monde 3 ; vous pouvez vous tromper ! Les choses ne sont pas dans les faits ce que l’on dit d’elles.
– Mais un méchant, c’est un méchant !
– Vous aviez admis que l’on peut se tromper sur les faits et preuves que l’on peut fournir pour établir la culpabilité d’un homme, et c’est pourquoi vous aviez admis que la peine de mort devait être abolie, ou au moins qu’elle ne devait être utilisée que dans les cas où la culpabilité est presque certaine. Vous vouliez cependant la conserver pour cela : cette personne qui fut condamnée, même si l’on sait que sa culpabilité était presque certaine, reproduit les mêmes forfaits dès sa sortie ; vous émettez donc une hypothèse, une loi, qui est que cette personne reproduit toujours le même forfait ; cette loi doit être ouverte à réfutation, donc vous ne pouvez pas tuer la personne.
– Au moins la peine de mort est-elle dissuasive !
– Dernier recours pour vous pour sauver la peine de mort : son caractère dissuasif. On objectera que comme Beccaria l’a déjà remarqué, son caractère dissuasif n’est pas établi. Mais là n’est pas le propos essentiel. En fait, il faut remarquer que la peine de mort coupe tout droit à l’erreur. La peine autre que la mort est en effet comme une réfutation permettant d’établir une nouvelle conjecture pour le criminel en lui faisant sentir ses erreurs. Tuez-le, et la peine perd sa fonction réfutative.
– Oui, mais ! Doit-on pour autant laisser le crime impuni ? Et si on ne tue pas les tueurs, et qu’il y a de plus en plus de tueurs ?
– Ce serait en ce cas une réfutation : on pourra peut-être essayer alors de tuer les tueurs pour voir si cela infléchi le taux de criminalité. On le voit, la peine de mort ne peut être pour un humaniste qu’une solution de dernier recours, et ce n’est pas au nom d’un seul homme, qu’il faut condamner à mort (multi-récidiviste ou autre) mais au nom de la société, en dernier recours : la société est en proie au nihilisme, tuons alors les nihilistes pour sauver la société. Il faut alors espérer que cela fonctionne, sinon, la société s’effondrera bientôt.
[amtap book:isbn=2081207508]
25 janvier 2013 à 20:28 phil lamothe[Citer] [Répondre]
salut,
vraiment bon votre débat les boys