ChIrak
Alors que pour toute personne digne de raison, le renversement du régime de Saddam Hussein en Irak semble tout à fait légitime, notre président Jacques Chirac n’a de cesse de répéter qu’il s’opposera à toute intervention militaire en Irak.
Rappelons tout d’abord brièvement les véritables objectifs du renversement de Saddam Hussein. L’Arabie Saoudite, état islamiste wahhabite (forme d’islam salafiste sur laquelle reposent les fondements même du Royaume Saoudien) et premier exportateur de pétrole du monde, finance les mouvements islamistes un peu partout dans le monde, et donc le terrorisme qui va avec. Même si la famille royale dément toutes ces pratiques, et a d’ailleurs été la première à nier toute implication dans les affaires d’Oussama Bin Laden après le 11 septembre (Bin Laden a en effet été déchu de sa nationalité saoudienne avant les événements), il n’en reste pas moins que les richissimes exploitants saoudiens utilisent les rentrées budgétaires offertes par le pétrole pour financer le djihad planétaire (le fait de vouloir convertir les non-musulmans, ou plutôt les non-islamistes, à l’islam wahhabite) et ainsi contrôler le monde musulman, et même non-musulman. Ce contrôle va du financement des mosquées (occidentales ou non, la mosquée de Lyon ayant été financée à hauteur de 3 200 000 d’€ par les puissances wahhabites), jusqu’au financement direct des groupes terroristes tels qu’Al-Quaïda, le Hamas, le Hezbolah, les GIA, l’AIS … Des associations aux apparences plus modérées comme l’UOIF (Union des Organisation Islamiques de France) tombent sous l’emprise financière saoudienne, et donc sous influence salafiste. Les conséquences sont certaines : une radicalisation du monde musulman européen dans un premier temps, puis une islamisation des démocraties laïques, pour arriver ensuite à une application stricte de la charia (loi islamique) et donc à une condamnation à mort de nos libertés durement acquises.
La solution de l’Amérique, qui est maintenant consciente du problème, serait donc de libéraliser le marché du pétrole, et de placer ainsi l’Arabie Saoudite en concurrence avec les autres pays producteurs, afin de l’affaiblir économiquement. L’Irak possède les 2ème réserves pétrolières mondiales, mais n’est que le 26ème producteur… Pourquoi ? Ceci à cause de l’embargo appliqué à l’Irak suite à la guerre du Golfe qui imposait des restrictions en matière d’exportation de pétrole. L’UNESCO dénonça les conséquences de l’embargo (qualifié de crime contre l’humanité) sur la population irakienne, et l’ONU vota la résolution 986, plus connue sous le nom de « Pétrole contre nourriture ». L’Irak baissa la tête et concéda à suivre cet accord en mai 1996. L’accord consistait à permettre aux irakiens d’exporter du petrole pour 2 milliards de $ par semestre, et d’affecter les recettes à l’achat de nourriture et de médicaments. Le montant de l’exportation fut réévalué en avril 1998 pour atteindre 5.2 milliards de $.
Et c’est lors de cet accord que la France est devenu le premier partenaire économique de l’Irak. L’état français est en effet son 1er fournisseur et son 2ème client. D’après la Chambre de Commerce Franco-Arabe, le volume des échanges franco-irakiens étaient de 1 650 millions d’€ en 2002, donc à peu près 35% du montant fixé par la résolution 986. Cela représente également près de 2% des échanges franco-allemands, l’Allemagne étant le premier partenaire de la France. Avec la conjoncture actuelle, ce n’est pas rien, la France étant égorgée économiquement, le budget prévu n’ayant jamais été aussi serré.
Mais cette affection franco-irakienne ne date pas d’hier. Liberation nous rappelle la fascination qu’avait Jacques Chirac à l’égard de Saddam Hussein lors de sa visite à Bagdad en 1974. Puis des accords passés pour armer l’Irak, ainsi que la livraison de 2 réacteurs nucléaires de recherche… Il est vrai qu’à l’époque Saddam Hussein n’était que le vice-président de l’Irak, avait les mains moins salles et qu’il ne deviendrait numéro un qu’en 1979, succédant ainsi au général Hassan al-Bakr. Mais Hussein dominait tout de même déjà l’appareil politique et militaire, en étendant notamment le contrôle du Baas sur l’armée Irakienne. Le Baas est le parti de Saddam Hussein qu’il rejoignit en 1957. C’est un parti nationaliste arabe et socialiste.
Lorsque la guerre Iran-Irak éclata, la France prolongea ses accords, et ira jusqu’à prêter 5 avions Super-Etendard aux irakiens ! Mais le vase finira tout de même par casser lors de l’invasion du Koweit, quelques semaines après le rééchelonement de la dette irakienne…
Mais l’Irak n’est pas la seule anti-démocratie avec laquelle la France entretient de bons liens. L’Arabie Saoudite est la 1er cliente de la France en armement. 15% des ventes sont dédiées aux royaume saoudien (sources : Alternatives Internationales n°6). Il semble évident que si l’Arabie Saoudite n’a plus d’argent, elle n’achètera plus d’armes. Ce n’est pas bon pour nos affaires…
Il est vrai que tout ceci s’est produit avant le 11 septembre, avant que les démocraties occidentales prennent véritablement consciences du danger que le totalitarisme islamiste représentait pour eux. Mais aujourd’hui se présente une possibilité d’affaiblir ce fléau, la démocratie américaine ayant décidé d’agir. De plus, mis à part les intérêts occidentaux, renverser Saddam Hussein permettrait de libérer enfin le peuple Kurde et les chiites, tout deux opprimés depuis des décennies. Mais cela permettrait plus simplement de libérer le peuple Irakien, terriblement affaibli par l’embargo, car il est bien évidemment impensable de le lever tant qu’une personnalité comme Hussein se trouvera au pouvoir. Bien sûr, il serait préférable que la solution se règle diplomatiquement, que les puits de pétrole ne se transforment pas en puits de sang. Mais nous connaissons malheureusement trop Saddam Hussein…
Cet anti-américanisme est mal venu. Serait-ce un vieil ascendant gaulliste qui coule dans les veines de notre président ? Nul ne le sait.
En tout cas, ce serait croire que la France peut être épargnée du terrorisme. Il est vrai que le seul terrorisme ayant sévi sur notre territoire provenait des GIA algériens, extrêmement divisés actuellement. En effet, tout le monde se souvient de 1995 et de Khaled Kelkal, ou bien de ce détournement d’avion en 1994. Mais la France, et à une plus grande échelle l’Europe, est une cible. Le Royaume-Uni l’a très bien compris. Mais Chirac semble nier la menace islamiste. Il doit sans doute, et pour ça il peut, faire confiance à son très efficace ministre de l’Interieur, Nicolas Sarkozy, pour régler cette question de l’islamisation de la France. Mais lorsque l’on voit ce dernier tenter de négocier avec l’UOIF, on peut se poser des questions.
Peut-être que Chirac est rentré dans cette logique de « Guerre contre l’Europe », et qu’il pense pouvoir retourner la puissance islamiste face aux Etats-Unis ? Il est vrai que Chirac possède depuis peu une bonne cote de sympathie dans les pays islamistes, on se souvient d’ailleurs de cette image frappante où l’on voyait un marchand de vêtements palestinien vendre des T-Shirt à l’effigie de Yasser Arafat, d’Oussama Bin Laden, et de … Jacques Chirac !
Si Chirac veut partir en croisade contre les Etats-Unis, il ferait mieux de construire une vraie Europe, solide et fiable, à 25 et non pas à 2 comme c’est ce qui semble se passer actuellement avec l’Allemagne. Cette Europe, qui posséderait alors une armée qui lui permettrait de pouvoir dire son mot sur la scène internationale, pourait briser l’unilatéralisme américain. Car les européens ont une grande carte à jouer en ce qui concerne l’après Saddam. En effet, l’opposition irakienne parait bien faible : seuls les communistes (PCI, PKK, PSUK), les islamistes (ASRII, ad-Daawa al islami) et les monarchistes (MMC) composent le paysage politique. La dernière, qui tente d’instaurer une monarchie constitutionnelle, à défaut d’être libérale, semble la plus fiable. Les Etats-Unis ont déjà planifié de contrôler plus ou moins l’Irak durant 18 mois. Si aucun gouvernement digne de ce nom n’est installé, on risque fort bien de se retrouver dans une position déchirante de néocolonialisme, l’Irak étant placée idéalement géographiquement. C’est à moment là que l’Europe devra se montrer vigilante et être ferme.
Mais actuellement, notre président déguisé en pacifiste fait bien pâle figure ! Toute la mouvance pacifiste voit maintenant en lui et son droit de veto un sauveur… S’il savait … Et s’ils savaient que la guerre en Irak n’aura pas lieu. Ce sera une bataille, car la guerre a commencée depuis longtemps, et a pour symbole de son commencement le 11 septembre.
[amtap book:isbn=2262019274]